Gnose, Guénon, Evola : entretien avec Gregor Ovitch de Noaches


​Arthur Sapaudia : Comment est né le site noach.es ? Pourquoi ce nom ?

Gregor Ovitch : Noaches est né en mars 2014, suite à la découverte en janvier 2013 de la vidéo de Pierre Hillard intitulée « Aux sources du mondialisme » où il est question du noachisme 1. Celle-ci fut une véritable révélation. Lisant René Guénon depuis mon adolescence puis évoluant entre les arcanes maçonniques une dizaine d’années, j’ai tiré le fil de cette mystique mondialiste puis ses conséquences pour, un an plus tard, y consacrer un site 2

Noachisme, frankisme plus généralement la mystique mondialiste est développée dans la seconde partie

Quant au nom, c’est un néologisme en réponse au terme noachite du premier article des constitutions maçonniques. Le terme noaches qui exprime une sorte de symétrie aux accents de science-fiction délabrée 3 m’a tout simplement plu. Dont acte.

Un maçon est obligé par sa tenure d’obéir à la loi morale en tant que véritable noachite et s’il comprend bien le métier, il ne sera jamais un athée stupide, ni un libertin irréligieux, ni n’agira à l’encontre de sa conscience.

Constitutions d’Anderson de 1738 — Article premier

Début 2020, la page Facebook de Noaches a été fermée sans sommation. Elle relevait les clins d’œil gnostiques parmi les œuvres littéraires, musicales et cinématographiques. Dès lors j’ai entrepris la traduction du tiers de l’œuvre colossale de David Livingstone 4 avec son aval. Celle-ci tout comme les entretiens partagent le même constat : l’omniprésence de cette mystique luciférienne qui, chose moins connue, s’articule telle une mâchoire avec une « opposition » servant de mandibule.

AS : Quel est votre avis sur René Guénon après toutes ces années d’études ?

GO : Que c’est un dissimulateur de génie. Guénon a entraîné dans les voies gnostiques un nombre considérable d’honnêtes gens, croyants ou non, qui sans lui ne s’y seraient pas aventurés 5. Ceci, qu’il s’agisse du théosophisme, auquel Guénon ne reprochait pas le caractère luciférien « purement symbolique » mais les dérives de ses « pseudo-initiés », ou bien de l’enseignement du mage satanique Aleister Crowley, habilement qualifié de « contre-initiatique » pour l’opposer à l’initiation 6. Bien que,  du point de vue des initiés, cette ingénieuse polarisation relève du conte pour enfants 7 – le baptême étant la seule « contre-initiation » 8 – la manœuvre était destinée aux « profanes » 9 afin de protéger l’institution maçonnique de ses détracteurs, voire de les y attirer. Encore aujourd’hui, cette sémantique fallacieuse est assénée de façon péremptoire par beaucoup de  guénoniens « virtuels » 10, loin d’imaginer à quel point les « hauts » initiés les méprisent. Ce que je peux comprendre.

Mme Blavatsky, qui donna ce nom de Lucifer à une revue qu’elle fonda en Angleterre vers la fin de sa vie, affectait de le prendre également dans ce sens étymologique de « porte-lumière », ou, comme elle disait, de « porteur du flambeau de la vérité » ; mais elle n’y voyait qu’un pur symbole, tandis que, pour les Lucifériens, c’est un être réel. 

René Guénon —L’erreur spirite (X. La question du satanisme) 11

Ainsi, l’ésotérisme bon marché de Blavatsky ou le satanisme décomplexé de Crowley, qui lui avait le mérite de la clarté quant à ses intentions, ont tous deux servi la stratégie guénonienne. En effet, sans ces occultismes rédhibitoires aux yeux des catholiques (surtout lecteurs de La France antimaçonnique et de la Revue Internationale des Sociétés Secrètes) Guénon n’aurait pu dévier la grogne anti-maçonnique ni prescrire l’antidote au sein de ces organes :  l’initiation « régulière » ! Lénine disait que pour contrôler l’opposition il fallait prendre sa tête. Magistral.

Extrait tiré de Gnôsis, Partie 1 – L’hameçon – Le mieux est l’ennemi du bien

AS : Avez-vous quelques exemples de dissimulations ? Guénon serait-il un « idiot utile » ?

GO : René Guénon a été un serviteur exceptionnel et conscient. En témoignent ses poèmes écrits à l’adolescence, et ce bien avant de pénétrer certains milieux occultes, « pour les détruire », écrira-t-il par la suite. Pourtant, les titres de ces poèmes ne font pas débat 12 et devraient clore celui autour de sa « conversion » à l’islam, toute aussi de façade 13.

En effet, bien que Guénon ait grandi dans une famille catholique, il a cessé de l’être dès sa jeunesse  « en son âme et conscience ». Il s’est alors tourné vers ces voies gnostiques considérant le christianisme apostolique comme l’ennemi 14 :

Un autre reproche qui nous cause le plus profond étonnement, c’est celui d’être les auxiliaires du cléricalisme, ou même des cléricaux déguisés ; nous ne nous en serions jamais doutés, nous qui ne comptons plus les excommunications lancées contre nous par la Sainte Église Romaine, ce dont nous nous faisons gloire d’ailleurs. » […] « Ce que le cléricalisme et la réaction sous toutes ses formes redoutent par-dessus tout, ce sont les maçons qui se rattachent à la tradition de l’Illuminisme, et cela se comprend aisément lorsqu’on sait quel fut le rôle historique des Illuminés. Ce sont eux qui travaillèrent sans relâche à l’affranchissement de l’Humanité, qui préparèrent la Révolution française, qui rédigèrent la « Déclaration des Droits de l’Homme » ; c’est à l’un des plus illustres d’entre eux, à L.-Cl. de Saint-Martin, qu’est due la grande Trilogie : « Liberté, Égalité, Fraternité », qui fut une devise maçonnique avant de devenir la devise républicaine.

Jean Desjobert, 30°-90° ; René Guénon, 30°-90° ; Victor Blanchard, 30°-90° – L’Acacia (1909)

C’est aussi en 1909, année de parution de cette tribune cosignée de Victor Blanchard 15 dans le périodique maçonnique L’Acacia, que Guénon a commencé à écrire dans La France antimaçonnique 16 contre la Revue Internationale des Sociétés Secrètes 17 pour y neutraliser l’hostilité de leurs lecteurs. Comment ? En y présentant la franc-maçonnerie comme victime subvertie par les agents de la « contre-initiation ». Pour donner crédit à ce chiffon rouge, Guénon donne quelques détails et en omet d’autres, biaisant la perception du lecteur « profane ».  Celui-ci, flatté par l’ésotériste de Blois assurant « écrire seulement pour ceux dûment qualifiés », n’imaginera pas que les coulisses décrites font aussi partie du théâtre. 

En effet, René Guénon explique au sein même des organes antimaçonniques que la subversion de la maçonnerie a été possible par sa dégénérescence spéculative, et que seule sa restauration opérative 18 lui serait salutaire. Mais alors, quelle est donc cette « bonne » maçonnerie qu’il promeut ? Précisément celle des Rose-Croix 19, dont il loue la pureté doctrinale mais ne rappelle jamais ni l’essence luciférienne de leur « supergnose », ni que ces « vrais  » Rose-Croix étaient tous de férus adeptes de sciences occultes et de lourianisme 20. Pas plus qu’il ne rappelle que leurs manifestes de 1614 étaient aussi anticatholiques que  « contre-nature ». 

Tel est bien le cas de l’Agarttha, si ce centre a recueilli, comme l’indique Saint-Yves, l’héritage de l’antique « dynastie solaire » (Sûrya-vansha) qui résidait jadis a Ayodhyâ (2), et qui faisait remonter son origine à Vaisvaswata, le Manu du cycle actuel. 

2 — Ce siège de la « dynastie solaire », si on l’envisage symboliquement, peut être rapproché de la « Citadelle solaire » des Rose-Croix, et sans doute aussi de la « Cité du Soleil » de Campanella. 

René Guénon — Le roi du monde (II. Royauté et Pontificat)

Le sens de l’histoire de Guénon converge logiquement avec la doxa maçonnique pour faire le procès du « faussaire » Philippe le Bel 21, sans toutefois un mot inconvenant sur les Templiers, pourtant Goldman Sachs de l’époque. Dans le même esprit, Guénon fait l’éloge de Dante 22, mis au ban par l’Église et qui sera, chose naturelle, réhabilité par le chef des Carbonari et révolutionnaire Giuseppe Mazzini. La particularité de Guénon réside en sa grande connaissance des symboles, ce qui lui permet de rectifier les erreurs d’autres occultistes et de faire autorité, pouvant ensuite balader le lecteur hypnotisé. En débutant son Roi du monde par Ferdinand Ossendowski, auteur d’un best seller de l’époque, Guénon évoque la probabilité du plagiat mais jamais celle du frankisme – pourtant criante – de l’auteur polonais 23, pas plus que celui des membres des Frères asiatiques 24. Pour comprendre ce postulat , toutes ces omissions et inversions historiques doivent être éclairées à la lueur du symbolisme qui devient le référent  25. Cela permet à Guénon de faire admettre à de nombreux catholiques que les cornes étaient supérieures à la couronne 26 et l’incantation à la prière 27 ! Ce qu’Aleister Crowley n’a pu accomplir, René Guénon l’a ingénieusement réussi en plaçant ce qui à trait au diable au-dessus de ce qui à trait à Dieu.

AS : Quel est votre avis sur Julius Évola ? Pouvez-vous commenter cette vidéo ?

Extrait tiré de la table ronde « Les héritiers de René Guénon » avec Jean-Marc Vivenza et David Bisson

Semblable à celui que j’ai pour René Guénon et les autres auteurs pérennialistes 28, se réclamant d’une tradition primordiale et de sa gnose. Elle est la seule véritable à leurs yeux, au point de rectifier celle des théosophistes qu’ils jugent « hérétique » 29. Et si Julius Évola est aussi opposé au monde moderne et un chantre du monde traditionnel, la question est de savoir : quel est ce monde, du païen ou du chrétien, foncièrement antagonistes 30 ? Pour Évola, il s’agit du païen, « impérialement » même, quand Guénon le dit entre les lignes avec d’improbables contorsions 31

En réalité, il faut bien comprendre que ni Évola ni Guénon ne s’opposent à l’essence luciférienne du système républicain 32. Ils regrettent simplement que cette mystique se cultive « sous le boisseau » et que le voile démocratique tarde à tomber. Ils ne sont en aucun cas pour le « retour du roi » tel que leur pamphlet anti-démocratique le laisse entendre 33. Leur objectif est de revenir à l’âge d’or des temps primitifs que le laïcisme, feuille de vigne forte utile pour scinder l’État du catholicisme, ne peut justifier et qui doit être jetée. Temps primitifs rythmés par les cultes cosmiques ouvertement chtoniens et saturniens, et des sacrifices à ciel ouvert.

Pour revenir à la question du pérennialisme, s’il est indéniable qu’il y a une source commune à toutes les traditions (païennes pour faire court) partageant moults archétypes, ladite Tradition primordiale ne peut en réalité être que secondaire. Sa paternité est « signée » par le serpent se mordant la queue 34, même si les gnostiques préfèrent insister sur son caractère cyclique. En effet, la polysémie 35 étant inhérente au symbolisme, aucun détail n’est anodin. C’est donc bel et bien le même serpent, tentateur et trompeur, qui promet à ceux goûtant à sa gnose qu’ils seront comme des dieux 36. Or la tradition n’étant que la transmission, pour s’opposer à la Parole de Dieu, la promesse du serpent ainsi que sa tradition ne peuvent que la suivre.

S’agissant de l’extrait vidéo de Baglis TV 37,  les propos des guénoniens Jean-Marc Vivenza et David Bisson sont pertinents quant aux différences entre René Guénon et Julius Évola, au sujet de la cohabitation des mondes traditionnel et moderne. Mais là encore, il s’agit de rappeler la finalité du tableau avant d’évoquer ses nuances (de gris) pouvant la faire oublier, d’où deux précisions : 

La première, c’est que la « voie de la main gauche » transpire davantage dans l’œuvre d’Évola 38 que dans celle de Guénon. À ce titre, si ce dernier attend le « renversement des conques » où son Roi du monde (allégorie du prince) sortira du bois, l’œuvre de Julius Évola est dépouillée de cet habillage mathématique et ressemble davantage à une ode romantique et fougueuse qu’à un mode d’emploi (avec omissions). Ceci explique probablement cette impression de vouloir  « renverser la table » tel un messianisme pressé. Mais j’insiste sur ce point : si le premier s’exprime de manière implacable et technocratique façon Jacques Attali, et le second avec fulgurance et lyrisme tel BHL,  c’est bel et bien la même spiritualité qui les anime et ils s’accordent sur l’essentiel.

La seconde, c’est que contrairement à beaucoup de guénoniens ne concevant pas la duplicité du  « Sphinx », David Bisson en a connaissance. Pour preuve voici cet extrait où celui-ci demande à Philippe Pissier, entre autres auteur de Dogme et Rituel de la Golden Dawn – Préliminaires à la Voie Thélémite d’Aleister Crowley, de tordre le coup à la rumeur selon laquelle Crowley serait un mage sataniste 39. Or, cette rumeur a été malgré tout entretenue par René Guénon lui-même, car utile à sa fable opposant initiation et « contre-initiation », bons gnostiques et mauvais sorciers. Thèse que Bisson, dans sa maladroite tentative de réhabilitation de Crowley, anéantit malgré lui.

AS : Vos dossiers sur la gnose sont remarquables. Mais qu’est ce donc, pour synthétiser, que cette gnose sur laquelle les catholiques rejettent tous les balbutiements d’hérésies ?

GO : Merci. Il s’agit d’un mouvement philosophico-religieux qui a prospéré 40 en milieu grec en réaction à l’Incarnation pour en endiguer la croyance galopante. Mais plutôt que de s’y opposer frontalement telle la révolte de Lucifer consécutive à l’annonce de Dieu que c’est en homme et pas en ange que Son Fils s’incarnera, ce mouvement a multiplié les attaques malignes et indirectes 41, notamment contre les natures divine et humaine du Christ ainsi que son Église.

Nous avons aussi rencontré des lecteurs qui nous ont tenu ce langage : « Depuis que j’ai lu vos livres, je vois la gnose partout ». Précisons bien : partout où elle est. Mais auparavant, vous ne la voyiez nulle part, et elle était bien présente. Vous étiez donc un gnostique sans le savoir, puisque les idées gnostiques vous paraissaient normales. Comment expliquez-vous cela ?

« Vous donnez des exemples nombreux qui aident à comprendre, parce que la gnose en soi, c’est vraiment ardu et difficile ». « Donner des exemples ! ». Voilà le rôle essentiel du maître qui enseigne. Lorsqu’il énonce une règle (de grammaire, par exemple) la formule abstraite, même apprise par cœur, n’illumine pas d’emblée l’intelligence. Il faut l’appliquer à plusieurs cas concrets, variés, imagés qui accrochent l’esprit et aident à comprendre.

Voici la définition du Petit Robert : « Éclectisme philosophique prétendant à concilier toutes les religions et à en expliquer le sens profond par une connaissance ésotérique des choses divines communicables par tradition et par initiation ». Cette définition n’est point fausse. Elle est tout simplement vide de sens et stérile pour celui qui ignore tout de la gnose. Elle ne lui apprend rien. Quel « sens profond » ? Quelle « connaissance » ? Quelles « choses divines » ? Le dictionnaire ne répond pas. On ne peut faire l’économie de l’étude approfondie et de la réflexion prolongée pour comprendre la gnose.

Étienne Couvert — Visages et masques de la gnose

Ce gnosticisme, qui s’étale sur les trois premiers siècles, est la forme particulière la plus aboutie de la Gnose entendue en son sens protéiforme et transhistorique. Cette période coche en effet toutes les cases 42 et voit apparaître l’église manichéenne, elle-même à l’origine de multiples implantations de Europe à l’Extrême-Orient 43.

Au-delà des différentes gnoses, prenant les formes selon les besoins du moment, la Gnose, comme celle avec un grand G au centre de l’Etoile flamboyante maçonnique, c’est tout simplement la prétention au Salut de l’âme par la connaissance. Les gnostiques parlent de la « co-naissance », à la fois cause et conséquence de cette identification 44 à Dieu, impliquant initiations, secrets et renaissances quelles que soit les variantes. En d’autres termes, si Connaissance du Soi et Délivrance par le Soi sont synonymes, de façon plus prosaïque le mot important est soi, avec ou sans majuscule. Par et pour soi-même, l’illuminisme n’étant rien d’autre que le doux nom du luciférianisme 45.

Quant à l’humilité tant claironnée, de fait impossible dès lors que la créature cherche à devenir tel le Créateur ou de s’en libérer, elle est plus un mantra destiné à casser les défenses immunitaires (si vous contestez c’est du fait de votre égo) qu’une réalité. Cette supercherie s’illustre concrètement par les decorum et titres grandiloquents dont les hauts gradés de la franc-maçonnerie, du bouddhisme ou du catharisme se parent.

Ainsi, que l’on soit fervent ou opposé à la Gnose, sa version « chrétienne » ne peut être conciliée ni superposée à l’enseignement catholique apostolique. L’argument de la considérer comme un adjuvant réservé à certains pour « mieux comprendre la foi » se substitue à l’universalité du message 46 et du Salut par la Foi, donc in fine à un renversement. En effet, comment prétendre avoir foi en Celui dont on transgresse allègrement les commandements ?

Ces divergences fondamentales posées, il est donc naturel que les apôtres de la Révélation tout comme ceux de la Gnose travaillent à convertir le plus d’âmes. Le problème hérétique tient du mélange des deux traditions favorisant la seconde 47 et appelle plusieurs remarques.

« Les femmes ne doivent pas entrer au paradis sauf si elles deviennent hommes » – Roland Hureaux

D’abord, si les catholiques doivent « crier leur doctrine sur les toits », les gnostiques, par la nature de la leur, sont condamnés à être sinueux et ne dévoiler leurs véritables référents qu’au fil de leur chemin initiatique 48. Sachant cela, les autorités ecclésiastiques devaient tenir un rôle préventif pour sauver le plus d’âmes possible. C’est d’ailleurs cette relâche qui permettra quelques siècles plus tard les infiltrations gnostiques puis maçonniques à l’origine de notre époque formidable.

Ensuite, si le mot hérésie signifie opinion et qu’il y a deux irréductibles traditions, adamique et ouroborique, la « religion à la carte » sert donc l’une ou l’autre, car en ce domaine la neutralité et la synthèse sont impossibles. Alors concrètement, si jadis certains villageois cristallisant des errances ne pensaient pas à mal en promouvant « leurs  » opinions, les manifestants des « Révolutions colorées » non plus 49. Où placez-vous donc la limite pour empêcher un plus grand chaos ? Viennent alors les questions quant au moindre mal et la présentation historique 50.

Comme toute guerre, la croisade albigeoise donna lieu à des excès. La prise de Béziers (1209) fut un véritable massacre. Il était impossible de distinguer, parmi la population de la ville, les cathares des catholiques. Le légat du pape, Arnaud de Cîteaux, aurait alors déclaré : « Tuez-les tous. Dieu reconnaîtra les siens. » La phrase est probablement apocryphe et peut être classée dans la panoplie des lieux communs anticléricaux. Mais elle reflète tout de même un fait certain : les cathares, qui s’étaient attirés depuis longtemps la haine du peuple par leur immoralité et la pratique de l’usure, risquaient le lynchage général. 

Or l’Inquisition empêcha ce massacre en distinguant les hérétiques des orthodoxes et les chefs des suiveurs, et en appliquant des peines proportionnées aux divers degrés d’hérésie. Finalement, l’Inquisition fit œuvre humanitaire. En punissant sévèrement les chefs, elle épargnait la masse des cathares qui était victime plutôt que responsable de l’hérésie. En traquant les hérétiques devenus clandestins, elle empêchait la renaissance du catharisme et de tous les désordres sociaux et moraux que cette doctrine provoquait. L’historien protestant Henri-Charles Léa, pourtant hostile à l’Inquisition, affirmait lui-même que le catharisme risquait de ramener l’Europe à la sauvagerie des temps primitifs et que la croisade albigeoise avait sauvé la civilisation 51.

Jean-Claude Dupuis — Défense de l’Inquisition (Le Sel de la Terre, n° 29  Été 1999)

Enfin, si les gnostiques ont l’habitude de décrier l’Église de Pierre pour encenser celle de Jean 52 prétendue moins dogmatique, l’ésotérisme chrétien a ses rituels et sa hiérarchie, et donc sa liturgie et ses dogmes 53. En témoignent les soi-disant laïcité maçonnique et bouddhisme athée où passés un certain stade, « quand l’élève est prêt, le maître apparaît » et certains masques tombent. C’est aussi pourquoi, si les discussions et citations religieuses sont jugées « hérétiques » en loge 54, ce n’est pas pour garder sa cohésion comme cela est souvent avancé, celles-ci étant permises aux agapes 55. C’est parce que toute référence au Christ perturberait l’égrégore maçonnique 56. Ce sont pour des raisons comparables que les Nations unies ont fait du 21 juin 57 la  « Journée du yoga » , mais que l’Union européenne n’autorise pas la circulation de centimes à l’effigie du Christ fabriqués par la Principauté d’Andorre 58. Les principes maçonniques ont eux aussi leurs hérésies.

AS : Laurent Guyénot, dans son article écrit que le gnosticisme est une hérésie juive avant d’être une hérésie chrétienne 59. Vos recherches vous ont-ils mené à la même constatation ? Comment situer la Kabbale là-dedans ? Laquelle découle de l’autre ?

Avant de vous répondre, je précise ne pas avoir lu les livres de Laurent Guyénot, que je sais éclectique (c’est une qualité) et « récentiste » (je ne connais pas le sujet). En revanche, l’ayant entendu sur le yahvisme je dois dire ne pas avoir été convaincu 60. Sur cet article, je le rejoins sur bien des points. Pas tous. 

La paternité du gnosticisme est effectivement attribuée à Simon le Magicien de Samarie. Ensuite, je constate malheureusement aussi que saint Paul est souvent récupéré par les gnostiques. Ceci, bien que le témoignage de saint Paul devant « sa conversion à une rencontre directe avec le Christ ressuscité, et non à un enseignement transmis par les apôtres » soit aisément réfutable par « Il vaut mieux s’adresser à Dieu qu’à Ses saints » ; les gnostiques ne supportant pas l’Incarnation. Ou encore que Paul de Tarse atteste de la résurrection de Son corps et réfute ainsi l’hérésie docète 61. Hélas les gnostiques osent tout. Encore récemment, un « séminariste guénonien » 62 l’insinuait  sous Gnôsis dans l’un de ses commentaires 63.

J’adhère aussi à sa description détaillée sur les origines de Mani (et de son père) et l’expansion de son église 64 mais j’ai des réserves sur sa thèse récentiste, bien que n’ayant pas les compétences pour la réfuter (simple intuition). Celle-ci m’inspire les sauts dans le temps de Philip K. Dick, génial et gnostique auteur de science-fiction 65, qu’il faisait faire à ses lecteurs afin de leur faire saisir le caractère démiurgique et matriciel du monde 66.

Comme je l’ai dit plus haut à propos de la Gnose, il faut distinguer sa sève (ou venin) protéiforme et transhistorique, que l’on peut essentialiser par le « Eritis sicut Dii »  du serpent, de ses adaptations contingentes. Le gnosticisme ayant été le premier à agir contre l’Incarnation, il en a pris l’acception usuelle (gnose minuscule). Après cette précaution sémantique, il est donc permis de parler de gnoses païennes tels les Mystères d’Eleusis 67 ou l’initiation égyptienne. De ces gnoses antéchrétiennes qui, même si elles ne pouvaient pas s’opposer à un Messie encore non venu, le voyaient d’un mauvais œil à en juger par l’accueil de Sa Promesse.

Ensuite, si le mot Kabbale, littéralement tradition (laquelle est la question) désigne des écrits ésotériques au vernis hébraïque et apparaît vers le XIème siècle en France, sa rédaction s’étale sur plusieurs siècles depuis la venue du Christ jusqu’au VIIIème siècle 68. Alain Pascal 69 désigne cette période par le mot Pré-Kabbale et voit également l’ésotérisme juif derrière le gnosticisme et le néo-platonisme. Oui, il y a manifestement un fond juif derrière certaines hérésies chrétiennes, comme l’arianisme rejetant la divinité du Christ (à l’instar du Talmud lui aussi en gestation). Mais pas toutes. Sinon, comment placer par exemple l’hérésie juive derrière le marcionisme 70 que Laurent Guyénot mentionne, hérésie chrétienne71 condamnée par saint Irénée ? D’autre part, si la plupart des Juifs attendaient leur couronnement avec le Messie et l’ont rejeté, personne n’en a malheureusement l’exclusivité. Ce que rappellent de nombreux Pères de l’Église pour évoquer cette compromission judéo-païenne contre le Christ.

« La gnose a permis de justifier la persécution des chrétiens. Elle est judéo-païenne […] vous avez une compromission des initiés païens avec les rabbins, entre autres, et les philosophes contre le christianisme » – Alain Pascal

Enfin, le judaïsme n’ayant plus lieu d’être après l’Incarnation, parler d’hérésies juives en milieu chrétien est équivoque 72. En effet, s’il y a indiscutablement un noyau de Juifs (majuscule pour la tribu de Judée) à la manœuvre derrière des hérésies chrétiennes durant les premiers siècles 73, ce ne sont plus des juifs (minuscule pour les adeptes du judaïsme) quand bien même ils s’en réclament pour ne pas avoir pas reçu la Bonne nouvelle qu’ils attendaient depuis 1300 ans : la suprématie sur les autres peuples, comme le souhaitent tous les peuples païens conquérants. 

Ce point est crucial pour ne pas tirer de conclusions hâtives à la moitié du chemin, à partir de la lecture biaisée de l’Ancien Testament par les sionistes. Si les Hébreux avaient été choisis 74 par Yahvé pour porter cette Promesse et la répandre, c’est bien toute l’humanité qui était destinataire. Mais ils se sont remis 75 à raisonner en païens à mi-chemin en s’appropriant l’universalité de cette Promesse faite 700 ans auparavant sur le Mont Sinaï durant leur exode à Babylone. Ce que Yahvé leur a reproché :

Dans l’Antiquité, seuls les juifs pratiquaient la Religion du Vrai Dieu. Toutes les autres nations, que l’Écriture rassemble sous le nom de Gentils, pratiquaient la religion païenne. Le paganisme de la gentilité était sous la dépendance de Satan. […] Nous connaissons surtout le paganisme par les réprimandes que Dieu adresse au peuple juif. Il lui reproche précisément d’adorer parfois les idoles des nations et il donne les raisons de ses reproches : 

« Les hébreux se mêlèrent aux nations et ils apprirent leurs œuvres. Ils servirent leurs idoles qui furent pour eux un piège. Ils sacrifièrent leurs fils et leurs filles à des démons ». (Ps. CV, 35-37) 

On trouve dans le Deutéronome, un passage dans le même sens : 

« Le peuple de Dieu a abandonné le Dieu qui l’avait formé et il a méprisé le rocher de son salut. Ils ont excité la jalousie de Dieu par des dieux étrangers ; ils L’ont irrité par des abominations ; ils ont sacrifié à des démons qui ne sont pas Dieu, à des dieux qu’ils ne connaissaient pas, dieux nouveaux, venus récemment, devant lesquels vos pères n’avaient pas tremblé. » (Deut. XXXII, 15-17) 

Au moment de l’Avènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ, le paganisme restait ce qu’il avait été dès les temps anciens et saint Paul donne des idoles la même définition que les livres de l’Ancien Testament : 

« Je dis que ce que les païens offrent en sacrifice, ils l’immolent à des démons et non à Dieu. Or je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons. Vous ne pouvez boire à la fois au calice du Seigneur et au calice des démons. Vous ne pouvez prendre part à la table du Seigneur et à la table des démons. » (I Cor. X, 20-21)

Jean Vaquié — Abrégé de démonologie

Ainsi, à la question qui découle de quoi, les hérésies juives sont d’abord le fruit des « hérésies païennes » 76 et la première Kabbale, celle de Babylone rédigée par les scribes juifs durant leur captivité, a réuni les secrets des gnoses égyptienne, phénicienne et babylonienne. Pour autant les Hébreux n’en ont ni la paternité, ni celle des logiques rituelles. Au contraire 77.

Qui alors a la patente de l’application de cette Gnose ? Les Étrusques, les Grecs, les Romains, les Celtes, les Gaulois, les Vikings, les Sumériens, les Phéniciens, les Yézidis, les Babyloniens, les Vikings, les Incas, les Mayas, les Aztèques, les Baoulé (Côte d’Ivoire), les Bwa (Burkina Faso) ou les Aborigènes ? Et j’en passe, on pourrait probablement y ajouter les Atlantes et bien entendu, leurs prédécesseurs jusqu’à remonter à ladite Tradition primordiale chère aux gnostiques. 

Le dieu cornu à travers les contrées et les époques. Dans l’ordre casque Veksø (Viking), masque Baoulé (Côte d’Ivoire), Cernunnos (dieu gaulois), Satyre (Grèce), le Sabbat des Sorcières (Pan en Espagne, Goya), Shiva Pashupati (Inde) et masque du Burkina. Noter la position en tailleur des dieux gaulois et hindou.

Aucun peuple plus qu’un autre. Car il y a bien un fond commun où se dégagent deux constantes : dieu cornu et sacrifices 78. Et c’est bien là, pour faire le lien avec vos précédentes questions, que veulent nous faire revenir des auteurs comme Julius Évola et René Guénon. Pour conclure, cette citation de saint Irénée que Laurent Guyénot reprend dans son article est plus qu’opportune, parce que laissant entrevoir les liens entre serpent et monde chtonien :

la Mère divine utilisa le serpent pour conduire Adam et Ève à désobéir aux ordres de Yaltabaoth et acquérir la connaissance, incitant ainsi la colère de ce dernier, qui a jeté le serpent dans le monde inférieur, avec Adam et Ève

Saint Irénée sur les Ophites

Citation que je complète de cet extrait d’Étienne Couvert 79 confirmant les liens entre les cultes de la fertilité et les sacrifices, Gaïa et le serpent :

La Terre-Mère est la plus ancienne divinité connue des ethnologues. Elle dispense la nourriture et la vie aux hommes ; elle gîte au fond de la terre et des eaux. C’est une divinité chtonienne, c’est-à-dire souterraine et infernale. Elle est la Mère de la Totalité, de l’ensemble du Cosmos ; elle a enfanté les grands serpents et les monstrueux reptiles. Son culte est toujours associé à celui du Serpent. On a trouvé dans les tombes d’Ur, en Chaldée, des statuettes féminines, à tête de serpent, qui allaitent un bébé. La déesse est souvent représentée au milieu de serpents lovés et entrelacés. Diodore de Sicile l’appelle Rhéa ou Istar et la représente entourée de serpents d’argent d’une grosseur énorme.

Le rôle du serpent dans la mythologie gréco-latine est considérable. Il suffit de parcourir un manuel classique de mythologie pour s’en convaincre. On sort d’une telle lecture submergé par la gent serpentine. Le rôle du serpent est bien connu dans les rites d’initiation des mystères d’Eleusis. Le culte de Delphes fut d’abord un culte de la Terre-Mère, à laquelle était associé le culte du Python, le familier de Gaia, la « Mère ». La Pythie, en se trémoussant sur son trépied, rendait ses oracles au nom du Serpent. C’est que toute la Grèce a été envoûtée pendant des siècles par ce reptile satanique.

On retrouve ce culte partout. Aux Indes, c’est le « Naga », le serpent « personnification des énergies profondes de la Terre », dieu du terroir, de ce sol mystérieux et profond d’où il est monté vers les hommes.

L’Église, en christianisant l’Occident, a lutté avec une énergie persévérante contre ce culte démoniaque et serpentin. Elle a mis des siècles à en débarrasser des pays latins. Or voici que depuis plus d’un siècle, une nouvelle génération d’écrivains s’efforce de réintroduire ce culte dans notre littérature. Il s’agit à la fois de ressusciter les anciens dieux celtiques et de remettre à l’honneur les grands thèmes gnostiques de l’Âme Universelle du Monde, du Retour dans la Terre, matrice originelle et de la réabsorption de tous les êtres dans le Grand Tout divin.

Étienne Couvert — La gnose universelle
(IV. Le mirage cosmique et le retour à la Terre-Mère)

Ce retour au paganisme est ce qu’il y a derrière l’écologie technocratique de Davos 80. C’est pourquoi, il est important que les opposants au Nouvel ordre mondial, qui prônent un « nouveau monde » alternatif avec le retour à Gaïa, comprennent les enjeux tel un « évangile de l’adversaire » et, subséquemment par la raison, l’impérieux besoin du retour à la Foi.


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1 – À ce jour auteur de neuf livres et d’une quinzaine de préfaces, l’une de ses marques est d’expliquer de façon logique et factuelle la technocratie mondialiste au service d’un messianisme.

2 – D’abord en surlignant certains passages de portraits Wikipedia puis en publiant les articles sur René Guénon de Karl van der Eyken, ex « Vénérable Maître » de la loge guénonienne « La grande triade ».

3 – Cf. les illustrations de Simon Stålenhag qui semblent tout droit sortir du récent Vesper Chronicles.

4Auteur canadien musulman accusé de gnosticisme par des catholiques donneurs de leçons le copiant sans le citer. Pour connaître un peu les sujets maçonnique et rosicrucien, ses travaux sur l’histoire occulte qu’il a démarrés en 1990, donc avant Internet, multiplient les informations inédites.

5 – Si la Belle époque, sous la Troisième république, grouillait d’occultistes dans la politique, l’art etc. le catholicisme voire l’antimaçonnisme étaient encore très enracinés au sein de la population.

6 – Il ne s’agit pas de contester le caractère démoniaque de la « contre-initiation »  mais de dénoncer la sémantique fallacieuse où l’initiation serait de nature angélique (oui si déchue).

7 – À l’instar de Star Wars où Jedi et Sith s’affrontent, ces derniers sont plus élitistes. Tous d’anciens Jedi adepte de la « bonne » gnose, en réalité la même que les Sith, mais moins approfondie, souterraine, et obscure. Mythe qui est une réactualisation de celui des Asuras (démons) et des Devas ou de celui des Titans et des Anges. Si les premiers appartiennent au monde souterrain et obscur, Guénon rappelle que les seconds prolongent ces racines à la « lumière ». Ce qui, malgré l’apparente symétrie, confère l’antériorité et la supériorité (causale) des premiers sur les seconds. Et la « voie droite », moins rapide (Nombre d’Or et escargot) et radicale que la « voie gauche » (sèche).

8 – Lors de l’initiation maçonnique, le néophyte « reçoit la lumière » sous-entendant que celle de son baptême ne compte pas. Ce n’est que le début.

9 – Terme maçonnique désignant ceux n’ayant pas reçu l’initiation et donc incapables de la comprendre, celle-ci se vivant à travers symboles et rituels. Principale raison invoquée pour justifier le secret. 

10 – René Guénon tenait à distinguer l’initiation « virtuelle » de l’initiation « effective », la première étant la préparation théorique à la seconde qui se vit. Or, chose paradoxale, de plus en plus de lecteurs citant Guénon se dispensent de cette finalité « pratique » qu’il disait nécessaire à la compréhension.

11 – Alors que tout au long de son œuvre il met en avant le pouvoir des symboles par cette réification chère aux gnostiques, Guénon coupe la passerelle entre cette haute réalité avec la réalité « tangible » sur certains sujets plus dérangeants. Car c’est bien la Lucis Trust (ex Lucifer Trust) de la théosophiste Alice Bailey qui bénéficie d’un « statut consultatif » auprès des Nations unies (ECOSOC) et y gère sa seule « chapelle religieuse », la Salle de Méditation avec un cube noir.

12 – Du guénonien Jean-Pierre Laurant dans Le sens caché dans l’œuvre de René Guénon (page 23) : « Quoiqu’il en soit les préoccupations du jeune homme étaient alors nettement orientées : voici les titres de ses poèmes : 1) le Vaisseau fantôme, 2) la Maison hantée, 3) Baal Zeboub, 4) la grande Ombre noire, 5) la haute Chasse, 6) Litanies du Dieu noir, 7) Samaêl (il apparaît avec son sceptre de fer : « la Mort est mon domaine »), 8) les Aspects de Satan, 9) Satan-Panthée (ad majorem Diaboli Gloriam) ».

13 – Guénon insistait sur l’importance de la terminologie : parler d’ésotérisme chrétien, juif etc. plutôt que de judaïsme ou christianisme ésotériques inversant nom et épithète, essentiel et accessoire. Par ailleurs, l’un des préceptes rosicruciens étant d’embrasser la religion et la tunique du pays, l’inverse aurait été étonnant une fois au Caire.

14 – C’est le cofondateur de cette loge guénonienne « La grande triade » (1947) Michel Dumesnil de Gramont qui le dit : « La civilisation catholique ne comprenait pas la liberté comme la civilisation maçonnique… Il n’y a pas de conciliation possible entre des principes aussi opposés, il faudra bien que l’une ou l’autre civilisation disparaisse ». En effet, c’est ce 33ème (Suprême conseil) qui a obtenu du Général de Gaulle l’annulation des lois antimaçonniques du Maréchal Pétain (Alger, 1943).

15 – Secrétaire-Rapporteur à la Chambre des Députés, chef du Secrétariat-Général de la Présidence de l’Assemblée-Nationale, chef du Service des Archives et grand maître de l’Ordre Martiniste (loge Melchizedek) et cofondateur du Mouvement Synarchique d’Empire (MSE) Victor Blanchard a également été Grand Maître de la Fraternité des Polaires à laquelle a appartenu René Guénon.

16 – D’abord appelée La France chrétienne, elle devient La France chrétienne antimaçonnique en 1910 et La France antimaçonnique en 1911, Guénon y écrit de 1909 à 1914, c’est-à-dire en même temps que ses articles dans L’Acacia (1909, dont sa tribune antichrétienne) et La Gnose (1909 à 1912).

17 – La RISS fondée par Monseigneur Jouin et qui eut pour rédacteur en chef le Marquis de La Franquerie et pour collaborateurs Charles Nicoullaud, Pierre Virion ou Léon de Poncins. Ceci devrait faire réfléchir les plus endoctrinés par Guénon quant à la réalité de sa mission.

18 – Pas corporatif. Confusion entretenue depuis des siècles par la maçonnerie pour se prétendre héritière des bâtisseurs de cathédrales, ce qu’elle ne peut être, référents spirituels antagonistes obligent, mais aussi dissimuler la dimension magique de la maçonnerie opérative ou de la « Haute maçonnerie », ce qui sinon trahirait son paravent laïc.

19 – Pour René Guénon le terme de « Rose-Croix » désigne des initiés à l’ésotérisme chrétien utilisant des corporations de constructeurs pour couverture et qui « enseignaient l’alchimie et d’autres sciences identiques à celles qui étaient alors en pleine floraison dans le monde de l’islam » (comprendre occultes) après la destruction de l’Ordre du Temple (1312). Ces « Frères Rose-Croix » n’auraient « jamais constitué une organisation avec des formes définies » et auraient quitté l’Europe à la suite du Traité de Westphalie (1648). Guénon les présente donc comme des sortes des « soufis européens » auxquels ont pu appartenir des théosophes tel Jacob Boehme et que l’on peut associer aux « Supérieurs inconnus » orientant les organisations initiatiques comme par exemple l’Ordre Martiniste Synarchiste de Victor Blanchard dans lequel ont été initiés les deux imperator de l’Antiquus Mysticusque Ordo Rosae Crucis (AMORC) Ralph Maxwell Lewis et le célèbre Harvey Spencer Lewis. Beaucoup de détails rappelant le Théorème Pasqua pour créer une affaire dans l’affaire et faire oublier l’essentiel, à savoir les mêmes intentions que les rosicruciens, martinistes et hauts maçons que ces « vrais » Rose-Croix ont donc inspirés, voire invisiblement guidés.

20 – D’après l’historienne britannique anoblie Dame Frances A. Yates, le fondateur mythique de la Rose-Croix Christian Rosenkreutz est revenu de ses voyages vers l’Orient avec la nouvelle Kabbale de Louria (La Lumière des Rose-Croix, Retz, 1978, p. 259). Dans ce prolongement, Jacob Katz, spécialiste des relations judéo-chrétiennes et professeur d’histoire sociale à l’université hébraïque de Jérusalem, écrit que L’Ordre des Frères d’Asie était principalement composé de sabbataïstes et de frankistes, des « authentiques Rose-Croix » (Juifs et Francs-Maçons, Du Cerf, 1995, p. 89).

21 – Cf. Le règne de la quantité et les signes des temps, chap. XVI – La dégénérescence de la monnaie

« 1 – Voir Autorité spirituelle et pouvoir temporel, p. 111, où nous nous sommes référé plus spécialement au cas de Philippe le Bel, et où nous avons suggéré la possibilité d’un rapport assez étroit entre la destruction de l’Ordre du Temple et l’altération des monnaies, ce qui se comprendrait sans peine si l’on admettait, comme au moins très vraisemblable, que l’Ordre du Temple avait alors, entre autres fonctions, celle d’exercer le contrôle spirituel dans ce domaine ; nous n’y insisterons pas davantage, mais nous rappellerons que c’est précisément à ce moment que nous estimons pouvoir faire remonter les débuts de la déviation moderne proprement dite. »

22 – Cf. L’ésotérisme de Dante

23 – Louis de Maistre relève Dans les coulisses de l’Agartha (2010) que Ferdinand Ossendowski désigne le « Roi du Monde » par le « Grand Inconnu » ou « Supérieur Inconnu » (Wielki Nieznany en polonais) et « Grand Frère » (Wielki Brat) dans la version polonaise de Bêtes, hommes et dieux (1921). Titres utilisés dans la Stricte observance et chez les Frères asiatiques. Par ailleurs Ossendowski était un conseiller clé du « baron fou » von Ungern-Sternberg,

24 – Loge rosicrucienne encensée par Guénon aussi appelée Ordre des frères et chevaliers de Saint-Jean l’évangéliste d’Asie en Europe comprenant d’éminents membres, dont Junius Frey le petit cousin de Jacob Frank, qui joua un rôle déterminant dans la Révolution française.

25 – Placer les symboles au-dessus des contingences au nom de réalités supérieures est systématique chez les gnostiques. Ainsi la carte l’emporte sur le territoire et l’utopie sur le réel. Guénon s’en sert également pour ne pas avoir à réfuter clairement le dogme de l’Incarnation, en faisant de Celle-ci un « détail de l’histoire » comparé à la symbolique dans laquelle il veut l’intégrer (avatara, docétisme) : « si le Christ devait être envisagé uniquement comme un personnage historique, cela serait bien peu intéressant ; la considération du Christ-principe a une tout autre importance » (Études sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, tome 1 – Un nouveau livre sur l’Ordre des Élus Coëns).

26 – Cf. Symboles de la Science sacrée, chap. XXVIII – Le symbolisme des cornes

27 – Cf. Aperçus sur l’initiation, chap. XXIV – La prière et l’incantation. Propos qui se retrouve dans La grande ombre noire qu’il a écrit adolescent où le possédé est délivré par un sorcier non par un prêtre.

28 – Tels que Ananda Coomaraswamy,Frithjof Schuon ou Titus Burckhardt.

29 – Si le New Age, mot inventé par la théosophiste Alice Bailey est transposé à gauche sur l’échiquier politique et le pérennialisme à droite, les théories raciales sont d’abord passées via la Theosophical Society puis la Golden Dawn avant d’atterrir dans l’Ordo Templi Orientis (OTO) prisée des nazis. Quant à la swastika présent sur le premier sceau de la Theosophical Society (entouré d’un ouroboros) elle se retrouve auparavant chez les Frères Asiatiques.

30 – Le païen implique sacrifices humains même en temps paisibles, ce à quoi le Christ a mis fin par le sien. Logique sacrificielle faisant au mieux du « pagano-christianisme » un creuset en proie au doute.

31 – Guénon cherche à tisser un héritage doctrinal entre ces antagonismes, pour faire du Christ, qui a pourtant dit venir rompre, une sorte d’avatâra perpétuant ses « prédécesseurs ». Or s’il est vrai que des églises sont souvent bâties sur des (ruines de) temples paÏens, ce n’est pas pour perpétuer leurs esprits mais bien les conjurer. S’il est indéniable qu’il existe des points nodaux telluriques ou corporels (chakras) là encore le procédé est fallacieux. Deux adversaires se disputant des points stratégiques ne signifie pas qu’ils pensent la même chose, mais que c’est justement une guerre !

32 – Cf. La mystique de la laïcité de Youssef Hindi (2017). Cet auteur rapproche notamment les propos de Vincent Peillon aux travaux de Gershom Scholem pour y voir les bougies de la Révolution française allumées par les Aufklärung allemandes, elles-mêmes fruit de l’illuminisme juif.

33 – Si La crise du monde moderne (1927) de Guénon et Révolte contre le monde moderne d’Évola (1934) associent modernisme et démocratie, aucun de ces auteurs ne dénonce la ploutocratie. Leur œuvre vise la fin de l’illusion démocratique pour passer à l’étape suivante, pas de ses tenants.

34Ouroboros en grec, également présent dans les traditions aztèque, védique, mésopotamienne, extrême-orientale, viking…Traditions païennes où le serpent est parfois ailé (dragon) ce symbole est également prisé par les alchimistes associé à la formule moniste « En to Pan » (Un le Tout).

35 – À la manière du Fusil de Tchekhov, si des symboles présents à des degrés ne sont mis en exergue qu’aux suivants, certains de leurs aspects ne sont eux aussi mis en lumière qu’à une certaine heure. Tout est point de vue dans la « carrière maçonnique » qui est un grand cadran solaire.

36 – « Eritis sicut Dii » du serpent de la Genèse aussi traduit « Vous serez comme Dieu ». Cf « Le mieux est l’ennemi du bien » de Gnôsisavec Alain Pascal, Roland Hureaux et Étienne Couvert.

37 – Si Baglis.tv se veut plus élitiste que Gaia.com, Netflix de l’ésotérisme d’où sortent les personnages de La meilleure version de moi-même de Blanche Gardin, elle est aussi plus dangereuse.

38 – Julius Évola était un membre important du Gruppo di Ur et proche d’Arthuro Reghini (membre de l’OTO d’Aleister Crowley) et de Maria Naglowska, ouvertement sataniste et probablement initiée par Grigori Raspoutine, elle a aussi traduit le célèbre Magia Sexualis de Paschal Beverly Randolph,  fondateur de l’Hermetic Brotherhood of Luxor et bras droit d’Abraham Lincoln qualifié en son temps qualifié par un tribunal d’homme le plus dangereux de la Terre.

39 – Résumer la volonté de Crowley à chercher « à choquer le bourgeois » avec ses frasques c’est à la fois faire fi des centaines d’infanticides parsemant ses livres de magie et faire passer les membres de ses loges para-maçonniques (Astrum Argentum, Ecclesia Gnostica Catholica, Ordo Templis Orientis) pour des « farceurs » et les immondices rituelles comme « purement symbolique » ! Faux et indécent.

40 – Plus largement tout le royaume indo-grec (Mani) et les autres rives du bassin méditérannéeen allant d’Alexandrie à Rome en passant par Byzance (Basilide, Carpocrate ou Marcion puis Proclus et Valentin) voire Antioche. Enfin, sur les origines de la gnose, si Ernest Renan en a donné des esséniennes au Christ afin d’en faire un initié, et donc un homme, sa thèse ôte de fait la paternité à Simon le Magicien (Samarie) généralement admise. D’où l’importance de dégager les constantes des innombrables aléas et variantes de cette Gnose par essence sinueuse, voire liquide.

41 – Une véritable ingénierie qui stimulerait la curiosité d’un auteur comme Lucien Cerise (voire immiscerait le doute compte tenu de la taille de l’entreprise). Tantôt la nature divine du Christ est visée (arianisme) tantôt c’est Sa nature humaine (docétisme). Son message aussi, pourtant intégral selon le Christ, qu’il faudrait compléter d’un enseignement secret (johannisme). Sa mère, via les attaques contre l’Immaculée conception ou encore la Promesse (marcionisme) de l’Incarnation, qui sans ne peut être cette Bonne nouvelle.

42 – Le monde matériel étant mauvais, la procréation aussi puisque renfermant des âmes dans des corps. Cette haine de la vie amène logiquement l’arhat ou l’endura (récompenses oscillant entre jeûne et euthanasie) ainsi que la nécessaire transgression de la loi naturelle. À ces préceptes s’ajoutent la prédestination, la métempsycose et ses variantes (palingénésie, réincarnation) et le plérôme (Empyrée, grand tout où tout retourne et repart) dont les cycles rappellent Un le Tout, débouchant sur le monisme puis le panthéisme : si Dieu est Un il est partout. Certaines gnoses, ou courants gnostiques, comprennent certains points mais pas d’autres. Néanmoins, trois demeurent, l’opposition farouche à la vision Ex nihilo, à la vie et, pour les gnoses post chrétiennes, à l’Incarnation.

43 – Si les mouvements gnostiques pullulent toujours à travers les sectes et les sociétés initiatiques, la disparition des Cathares marque la fin, en Occident du moins, de l’église manichéenne. Passés aussi par les Vaudois ou les Patarini (Piémont) et les Bougres (Bulgarie), néo-manichéens (Pauliciens ) chassés par les empereurs byzantins. En Orient, si l’on considère le bouddhisme comme un christianisme défiguré par ce manichéisme, cette église manichéenne subsiste alors. À ce titre, si Étienne Couvert a pointé l’impossible antériorité du bouddhisme, la chose est à la fois corroborée par Henri-Charles Puech, ayant chaire d’histoire des religions du Collège de France durant 20 ans) ainsi que Gustave Le Bon dépêché par le ministère de l’Instruction nationale en Inde, avait conclu que le bouddhisme, de par son absence de temples, n’avait pu y naître, mettant à mal l’origine indienne.

44 – Illusoire forcément, on parle aussi de réification ou de « divinisation de l’homme ». Cette dernière expression est plus trompeuse, associant l’orgueilleuse volonté de se faire dieu et celle d’une meilleure version de soi-même pour plaire à Dieu, ce que cherchent par ailleurs tous les croyants.

45 – Si les adeptes de l’illumination mesurent leur « niveau de conscience » tantôt les chakra (yoga) ou l’Arbre des Sephiroth(Kabbale) voire le septénaire (alchimie) les dégâts « hors cadrage » suite à une montée trop brutale, sont fréquents. D’où la nécessité pour René Guénon de recourir à des upa-guru (maîtres extérieurs) les cas spontanés étant rarissimes (Jacob Boehme). Le véritable guru est donc intérieur et la kundalini située au sacrum, le serpent à dérouler jusqu’au « troisième oeil ». Tout est dit.

46 – Le Christ dit avoir tout révélé. Lui prêter un enseignement nocturne ou secret permet de motiver les candidats à l’initiation « chrétienne ».

47 – Un compromis demeure une erreur lorsqu’il s’agit de principe et non de mesure. Si une doctrine assure que 2 et 2 font 4 et une autre 5, celles donnant 4.5 et 4.001 ne sont pas plus vraies, seulement plus trompeuses. Ainsi les hérésies les plus dangereuses ne vont présenter pas Lucifer en libérateur (ça c’est après l’initiation et quelques degrés) mais les plus furtives. C’est pourquoi les gages chrétiens de Guénon sont plus dangereux que les caricatures antichrétiennes de Crowley. D’ailleurs, cette remarque de Guénon du chapitre II dans Le roi du monde (La « Shekinah » et « Metatron ») est à la fois dénonciation judicieuse et pour les avertis, exaltation de son œuvre viciée : « la confusion entre l’aspect lumineux et l’aspect ténébreux constitue proprement le « satanisme » ».

48 – Cela va de mythes tel Prométhée (Lucifer) volant le feu « pour les hommes », Lucifer le « gentil » civilisateur face à Yahvé le « méchant » démiurge, ou encore le serpent rédempteur et « vrai » Christ, en s’assurant de leur emprise graduelle à mesure de la réception d’indicibles secrets.

49 – Voir les articles de Thibault Kerlirzin. Cet auteur, déjà en pointe sur les « Révolutions » colorées de George Soros, nous a permis de saisir la dimension mystique de l’écologie institutionnelle.

50 – Les historiens franc-maçons ont érigé les Cathares en martyrs de l’Inquisition, puis repris. Logique étant donné que catharisme et maçonnisme veulent la fin de l’Église catholique. Cependant, chacun peut vérifier que les Cathares comme les Manichéens pratiquaient l’endura (se laisser mourir) et l’usure et étaient opposés à l’agriculture et l’enfantement. Tel Davos.

51 – Note 1 — Léa Henri-Charles, Histoire de l’Inquisition au Moyen-Âge, Paris, Éd. Jérôme Millon, 1986, 3 volumes.

52 – Globalement le johannisme est la prétendue doctrine secrète chrétienne, contredisant de fait le Christ ayant dit avoir tout révélé, et qui se retrouve notamment chez les templiers puis néo-templiers, rosicruciens, martinistes et évidemment certaines formes « chrétiennes » de la franc-maçonnerie.

53 – On parle souvent de la maçonnerie adogmatique, c’est rigoureusement faux. Ils sont simplement dilués dans un principe créateur nominaliste dissimulés et précisés au fur et à mesure de la « progression », à la différence de l’Église catholique les énonce d’entrée de jeu et de façon invariable.

54 – Quant au prologue de saint Jean qui ouvre les travaux, certains « hauts » maçons en ont une interprétation semblable au soleil noir. À propos de la Lumière, la phrase « les ténèbres ne l’ont point reçue » ou plus encore, dans sa traduction « les ténèbres ne l’ont point comprise » que le mot comprendre a le sens d’embrasser, entourer. Autrement dit les ténèbres ne l’ont pas comprises car sont à l’intérieur même (ou au-dessus) de cette Lumière ! La gymnastique gnostique, c’est sportif.

55 – Sauf s’il s’agit de « travaux de table » justement, les agapes prolongent les travaux fermés. 

56 – La réciproque est vraie, un abbé ne tressera jamais de couronnes au démon en pleine messe. À propos du mot égrégore, Guénon corrige la signification de troupeau donnée par Éliphas Lévi (ex diacre sataniste présenté comme un occultiste mais passons) par celle de veilleurs, mais là non plus sans rappeler que c’est aussi l’autre nom des anges déchus du Livre d’Hénoch (nephilim).

57 – Cf. https://www.un.org/fr/observances/yoga-day Solstice d’Été déjà occupé en France par la Fête de la musique de Jack Lang.

58 – Cf. https://www.cathobel.be/2013/08/andorre-pas-de-visage-du-christ-sur-les-pieces-de-monnaie/ et https://www.grandsudinsolite.fr/948-principaute-d-andorre-pas-d-euro-avec-le-christ.html 

59 – « Tout porte à croire que le gnosticisme est issu de Palestine, peut-être plus précisément de Samarie, et qu’il s’est répandu en Anatolie et en Afrique du Nord durant et après les guerres judéo-romaines (68-135), donc en même temps que le christianisme auquel il s’est étroitement mêlé. De l’avis de Gilles Quispel, dont les travaux font autorité, le gnosticisme est une hérésie juive avant d’être une hérésie chrétienne, et durant les trois premiers siècles, il existe des gnostiques chrétiens et des gnostiques anti-chrétiens, mais tous sont juifs. Même les textes gnostiques chrétiens les plus anciens, comme l’Apocryphon de Jean ou l’Évangile de Vérité, ne sont chrétiens que de façon superficielle : ils ne font jamais référence à la vie terrestre du Christ, mais présentent celui-ci comme un principe angélique, un éon supérieur, assimilé au Fils de l’Homme du Livre de Daniel. ».

60 – La grille de lecture de l’Ancien Testament par les sionistes n’en fait pas ce qu’ils disent. Cette essentialisation d’une interprétation biaisée mène à des conclusions hâtives sur Yahvé et fait le jeu du marcionisme. Pour approfondir lire La Clef des Écritures, le dernier livre de l’abbé Rioult.

61 – Contrairement à l’arianisme attaquant la nature divine du Christ, le docétisme en nie la nature humaine pour en faire une sorte d’émanation. Quelles que soient les variantes, aucune gnose ou hérésie ne peut admettre la double nature de l’Incarnation, ce qui impliquerait de la reconnaître comme telle.

62 – Ça existe ! René Guénon étant aussi insistant sur l’initiation effective que méprisant à l’égard des profanes, qu’un des leurs vende son enseignement relève du fantastique.

63Verbatim : « Or à Dieu soit la Grâce, Lui qui toujours nous fait triompher dans le Christ et qui fait paraître le parfum de sa Gnose (Gnôsis) à travers nous, partout ! (2 Co 2.14) ». Sans retrouver la même traduction, la gnose dont parle saint Paul ne désigne pas la même chose que la « fausse gnose », reconnaissable à son caractère initiatique et secret. C’est d’ailleurs en raison de cette ambiguïté faisant le jeu adverse que les Pères de l’Église ont abandonné ce mot pour théologie.

64 – À laquelle s’ajoutent quelques pays (Afghanistan, Tibet…) situés entre le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient où l’église manichéenne s’est officiellement implantée. En effet, adhérent à la thèse d’Étienne Couvert (voir note 41) selon laquelle le bouddhisme n’est pas né en Inde et serait postérieur au Christ., Outre ces contradictions historiques et géographiques servant les intérêts maçonniques (Eugène Burnouf ne peut être remis en question à l’université, Bouddha illuminé sous un arbre sonne comme une revanche…) les « dogmes » et les symboles du bouddhisme convergent à cette idée qu’il soit un christianisme défiguré par la gnose manichéenne.

65 – À la différence d’un Julian Huxley au courant des plans de sa famille, Philip K. Dick ne l’était pas et a écrit d’innombrables nouvelles inspirant des films tels que Blade Runner, Minority Report, Total Recall ou Truman Show.

66 – Certains disent que l’expérience qu’il raconte à Metz en 1977, devant un parterre de gauchistes sans doute médusés par sa démarche christique, a inspiré Matrix. Voir ce documentaire.

67 – Mystères à prendre ici dans le sens de secrets, puisque initiatique. Les mystères étant intégralement énoncés mais inaccessibles à l’entendement humain quand les secrets (initiatiques) le sont mais sont dissimulés par « stratégie ».

68 – Après le XVIème siècle on parle de Nouvelle Kabbale et au XIIIème siècle de Kabbale orientale.

69 – Cet auteur a écrit La Guerre des gnoses, sous-titrée les ésotérismes contre la tradition chrétienne comprenant huit tomes.

70 – La thèse de Marcion est d’autant plus incroyable qu’elle est reprise par des néopaïens souhaitant un retour aux cultes cosmiques, impliquant précisément les barbaries dont elle accuse les Hébreux.

71 – Cette hérésie est une attaque en biais contre le Christ. En cherchant à salir Yahvé et ses premiers serviteurs, c’est le caractère divin de la Promesse qui est visé sans laquelle l’Incarnation ne peut être.

72 – Après le IIème siècle dans le monde grec, le terme Hébreux est remplacé par Juifs pour qualifier le ce peuple sémite, engendrant la confusion avec le terme juifs pour désigner les adeptes du judaïsme.

73 – Et bien sûr après, tel le frankisme du XVIIIème siècle ne peut pas être qualifié d’hérésie, mais il comporte aussi une part de secret, de magie et de dissimulation propres à la gnose.

74 – Peuple élu ou maudit, ou les deux ? Certains feront le parallèle avec l’ange préféré de Dieu, qui par sa révolte et ayant pris la tête des démons, s’est maudit lui-même.

75 – Car entre la sortie d’Égypte et le Mont Sinaï, les Hébreux ont idolâtré le Veau d’Or.

76 – Hérésie signifiant opinion et le paganisme n’appartenant pas à la tradition adamique (hébraïque, chrétienne) l’expression « cultes païens » serait plus judicieuse mais exprime moins la filiation.

77 – C’est le contraire, ainsi le sacrifice du bouc-émissaire et non plus du fils aîné était déjà un pas vers l’abolition du sacrifice.

78 – En Europe c’est le diable des campagnes ou des forêts (Pan, satyre).

79 – Cet auteur, qui a passé sa vie a déniché la gnose (notamment dans les « classiques » littéraires) a écrit six livres sur la gnose.

80 – Cf. https://davocratie.com/davotion

8 commentaires sur « Gnose, Guénon, Evola : entretien avec Gregor Ovitch de Noaches »

  1. La métaphysique de Guénon est fausse. Elle n’est pas ontologique du réel ou de l’être, qui considère l’étant en tant qu’étant avec ses attributs essentiels. Elle est une métaphysique du possible, du « possible universel », qui se réduit à la logique mathématique et non à la logique du réel. Il s’agit encore d’une inversion, parce que la métaphysique est au service de l’universel, et non l’inverse ! Il dit : « nous ne pouvons concevoir la Vérité métaphysique autrement que comme axiomatique dans ses principes et théorématique dans ses déductions, donc exactement aussi rigoureuse que la vérité mathématique, dont elle est le prolongement illimité. ».
    Guénon séduit avec son mathématisme « logique » mais le problème est que l’objet ne s’y prête pas : Dieu n’est pas l’objet des maths ! Les mathématiques constituent la science d’étude des quantités spatiales, des nombres (arithmétique) et des figures (géométrie) ; une science qui ne dépasse pas le domaine physique. Dieu a créé des choses visibles et invisibles et Il a disposé dans le domaine visible « toutes choses avec nombre, mesure et poids ».
    Les mathématiques renvoient de ce fait explicitement au créé visible, la matière ; d’ailleurs dans l’invisible il n’y a rien à mesurer, donc il n’y a rien à nombrer – tout au moins pas pour un esprit naturel. Par contre, Guénon, comme tous les gnostiques, prend le nombre dans un sens analogique et symbolique selon le pythagorisme néoplatonicien et la kabbale. Pour lui, la transposition analogique du nombre relève de « l’analogie dans son acception la plus rigoureuse, c’est-à-dire, suivant la formule hermétique, comme le rapport de ‘‘ce qui est en bas’’ avec ‘‘ce qui est en haut’’ ». « Ce qui est en haut est en bas, et inversement » constitue la formule inviolable de la doctrine hermétique ; celle-ci est gravée dans une Table d’Émeraude datant des premiers siècles après J-C. Guénon dit que l’« ésotérisme chrétien » tire son origine dans l’hermétisme. Indépendamment de l’imposture de l’existence d’un ésotérisme chrétien, il témoigne volontairement ou non de son ignorance : le Corpus Hermeticum date du Vème siècle après J-C !
    Cette « analogique rigoureuse » entre le haut et le bas (le ciel et la terre) n’est rien d’autre que la transposition d’une donnée d’ordre physique en un concept d’ordre spirituel – une mystification réalisée avec adresse ! C’est le panthéisme le plus évident, chose dont Guénon s’est toujours défendue… Les gnostiques n’ont jamais été à une contradiction près !

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  2. Il est dommage de réduire Guenon à un « dissimulateur de génie » et de ne voir en lui, au final, qu’un outil de plus de ce fameux « malin » qui vous obnubile. Le diable serait il plus intéressant que Dieu ? Non bien sûr, il n’est qu’un process évolutif, pas forcément nécessaire évidemment mais dont la puissance potentielle (notre propre puissance donnée par Dieu en héritage) nous terrorise ce qui est naturel au niveau où nous nous trouvons encore. Il est donc necessaire de s’extraire des tropismes propres aux chapelles pour pénétret le sujet de Guenon. Les religions, toutes, ont un rôle purement transitoire contrairement aux révélations qui sont universelles. Elles prétendent toucher aux dimensions transcendantales mais peinent au final à dépasser, même empiriquement, les conditions et les peurs primitives de la matérialité. L’interminable débat ponérologique qui leur sert de colonne vertébrale le démontre. Une foi profonde et sensitive, c’est à dire reliée à la chaleur vitale du Divin, fait aisément l’économie de ce concept purement cognitif. L’intellect, même s’il est un outil extraordinaire reste froid, laborieux et dédié aux œuvres de la temporalité dans le cadre prosaïque de la troisième dimension. Il est ici confondu avec la conscience multidimensionnelle que Guenon, ou Evola, entre autres, s’appliquent à mettre en lumière. Et qui est le propos commun à toute tradition initiatique inspirée. C’est la tradition primordiale, soit l’architecture intime, immuable et multidimensionnelle de la manifestation Divine.

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  3. 1) Les notes 8, 12, 14, 20 et 21 étant aussi factuelles que vérifiables, il est permis de parler de « dissimulateur » à l’endroit de René Guénon.
    2) Parler de « dissimulateur de génie » me semble plus judicieux afin de marquer la différence avec un « petit dissimulateur » tel Éric Zemmour.
    3) Les goûts ne se discutant pas, il n’y a pas grand chose à dire à votre commentaire très « abstrait ». Néanmoins, parce que sa tonalité donne l’impression que vous auriez compris quelque chose qui m’a échappé ma question est : avez-vous été initié ou, à l’instar de neuf guénoniens sur dix auxquels j’ai eu affaire, n’a pas appliqué les recommandations de Guénon et est resté dans la virtualité ?

    En vous lisant, vous me semblez être un « profane » qui parle de grandes choses qu’il n’a pas entrevues. Mais je peux me tromper, donc si vous répondez merci de cette précision.

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  4. Tout d’abord, et j’aurais du le faire en premier, merci pour la richesse de votre texte et la rigueur de votre travail. Ma réaction critique ne visait que l’orientation eschatologique de votre analyse. Merci aussi pour votre reponse bien que je sois étonné de voir mon commentaire qualifié d’abstrait. Je ne suis pas spécialement Guénonien car cela ne veut pas dire grand chose à mes yeux mais vous êtes dans le vrai : je suis un profane, initié à aucun mystère, spécialiste d’aucune connaissance en particulier, en fait simplement attaché aux dénominateurs communs qui les animent sous la surface, du moins celles, nombreuses, que j’ai visitées ». Si leurs déclinaisons qqsont infinies ces dénominateurs communs (l’aspect multidimensionnel de la manifestation en est un, par exemple) ne sont pas nombreux dans leur essence et s’imposent par leur constance, nous indiquant implacablement le réel, que j’appelle aussi l’évidence, que j’appelle aussi Dieu, qui est le seul sujet. Vous connaissez ces dénominateurs tout comme moi mais nous n’en avons peut être pas la même lecture, n’en faisons sans doute pas le même usage. Cet usage que d’ailleurs vous supposez virtuel à mon endroit, une impression que vous avez me dites vous.
    Mais qu’ai je dit ?
    Que les religions étant ancrés dans la matérialité se limitaient naturellement à celle ci. Ou qu’il était dommage de réduire Guenon au statut d’ instrument du malin car le diable procédant à l’évidence de Dieu, il n’est lui-même qu’un effet quand Dieu est la cause de tout. Ce n’est ni illogique ni abstrait et résonne intelligiblement avec l’ensemble de votre démonstration qui a mes yeux pêche par manque de Syncretisme. Autre qquestion toujours sans réponse, le diable posséderez- t’il une force qui lui est propre et se doit il d’être combattu ? Et avec quelles armes, quelles réthorique, celles là mêmes qu’il a créées et dans lesquelles il excelle ? Ce n’est donc pas une histoire de goût comme vous dites mais de perspective.
    J’ai aussi mentionné la cognition et l’intellect en tant qu’outil dedié à l’unique dimension matérielle quand a l’evidence l’intuitif ou le sensitif, notamment par le symbole, donnent accès à la multidimensionnalité. Ne faisais je pas encore, en évoquant ce thème cher à Guénon référence à votre approche essentiellement intellectuelle et dogmatique, qui a les qualités et les limite de sa nature propre, sur un sujet touchant aux socles dichotomiques qui nous interrogent depuis toujours ?

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    1. 1) Votre syntaxe est lisible. Faisant aussi des fautes ce n’est pas moi qui vais les pointer.

      2) Être « profane » est loin d’être d’une tare. Le contraire, compte tenu ce que je dis de l’initiation, serait incohérent. Mais vous devez savoir que pour les gnostiques en général, et en parituclier pour les « initiés guénoniens », être « profane » est rédhibitoire pour parler de ces sujets.

      Or toujours ou presque ce sont des guénoniens « profanes » qui, fuate de ne pouvoir réfuter quelques exemples « concrets », recourent à l’argument d’autorité. Ils se lancent dans mon absence de probité ou de qualification en la matière. Ce qui se retourne inmanquablement contre eux, et ce d’autant plus que c’est René Guénon, qui impose de passer de la théorie (initiation virtuelle) qu’il expose à la pratique (initiation effective).

      3) Oui Guénon répond à des questions existentielles. Mais mal. Et ce n’est pas une question de compétence, mais parce qu’il a toujours été dans le camp adverse. Expliquant les moults tromperies et « pattern » gnostiques qu’il employait sans le nom (pour abaisser les défenses des catholiques).

      4) Maintenant, concevant que l’on se perde dans Guénon, l’ayant été assidument entre 16 et 36 ans, je relate certaines choses pour que, le temps aidant, des « guénoniens sincères » ouvrent les yeux sur les véritables enjeux de l’initiation (maçonnique ou autre) et de Guénon (de fait inséparables) expliquant les raisons profondes de leurs dissimulations.

      5) À défaut de ne pas pouvoir ou/et vouloir suivre l’initiation, je leur conseille de s’interroger cliniquement quant à cette prétendue opposition entre initiation et « contre-initiation ». Soit en partant d’un guénonien tel David Bisson amené à défendre Aleister Crowley (question 4) soit depuis un crowleysien notoire tel Christian Bouchet sortant du bois pour défendre Guénon (tweet 24/8). Véritable aubaine pour justifier un bonus sur noaches courant septembre et qui reviendra, à travers son étude de cas, sur la porosité entre ces « frères » ennemis.

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  5. À propos de Guénon et la Tradition primordiale; je le cite: «il ne nous paraît pas douteux que les origines de la légende du Graal doivent être rapportées à la transmission d’éléments traditionnels, d’ordre initiatique»; «le Saint Graal est la coupe qui contient le précieux sang du Christ»; «il y a des symboles qui sont communs aux formes traditionnelles les plus diverses et les plus éloignées les unes des autres, non pas par suite «d’emprunts» qui, dans bien des cas, seraient tout à fait impossibles, mais parce qu’ils appartiennent en réalité à la Tradition primordiale dont ces formes sont toutes issues directement ou indirectement.»; «Cette coupe se substitue donc en quelque sorte au Cœur du Christ comme réceptacle de son sang, elle en prend pour ainsi dire la place et en devient comme un équivalent symbolique; et n’est-il pas encore plus remarquable, dans ces conditions, que le vase ait été déjà anciennement un emblème du cœur? D’ailleurs, la coupe, sous une forme ou sous une autre, joue, aussi bien que le cœur lui-même, un rôle fort important dans beaucoup de traditions antiques; et sans doute en était-il ainsi notamment chez les Celtes, puisque c’est de ceux-ci qu’est venu ce qui constitua le fond même ou tout au moins la trame de la légende du Saint Graal.».
    Pour Guénon la Vérité n’est pas venue dans le monde avec le Christ. Elle existe depuis l’époque primordiale, et constitue le «dépôt» d’un Centre suprême où elle est conservée intégralement. C’est de ce Centre qu’émanent des adaptations de la vérité, conformément à la prédisposition intellectuelle des peuples, déterminée par l’aspect qualitatif des époques selon la loi des cycles cosmiques. Voici résumée la doctrine de Guénon, nourries aux influences rosicruciennes et augmentée du prédestinatianisme hindou.
    De ce fait, le Christ n’est rien de plus qu’un porte-parole du Centre suprême, un avatâra, une «descente du ciel», comme Vishnu qui en est à son dixième, en y mêlant Bouddha de source exogène. Guénon: «nous ne disons pas «incarnations», comme on le fait habituellement en Occident», et précise le fond de sa pensée doctrinale: «Disons-le très nettement, si le Christ devait être envisagé uniquement comme un personnage historique, cela serait bien peu intéressant; la considération du Christ-principe a une tout autre importance».
    Sans l’Incarnation il n’y a plus de Christ, plus de christianisme! D’où tient-il cette énormité? Elle vient directement du «Messie-principe» de la Kabbale, principe qu’il a développé dans son Roi du Monde. Selon cette doctrine «imaginale», le principe de la «lumière du Messie» serait la Shekinah, synthèse de l’arbre séphirotique. La Shekinah a un parèdre appelé Metatron, le «Trône divin», puisque celui-ci est numériquement (sic) équivalent à Shaddaï, le «Tout-Puissant». Metatron est aussi appelé l’«Ange de la Face», et il a même deux Faces: l’une «ténébreuse», l’autre «lumineuse»; respectivement relative à l’Anti-Messiah, l’autre au Messiah. Ils sont aussi, d’après Guénon: «réunis dans l’«amphisbène», le serpent à deux têtes, dont l’une représente le Christ et l’autre Satan». Et il précise: «que la confusion entre l’aspect lumineux et l’aspect ténébreux constitue proprement le «satanisme». C’est du manichéisme à l’état pur! Et sans confusion possible, on voit explicitement la lignée doctrinale serpentine de Guénon, qu’on retrouve dans toute son œuvre, entre autres, à propos des deux visages de Janus, du Rebis hermétique et de l’androgyne…
    Déjà Philon le Juif avait fait du Logos un ange, des gnostiques ont perpétué ce concept. Ce n’est pas tout, les gnostiques ont même fait de Yahwé biblique un mauvais dieu qui avait incorporé, emprisonné, les âmes «préexistantes». Subséquemment, Dieu (Yahwé) de la Révélation sera relégué à la place d’un «démiurge» platonicien. Avec son «intuition intellectuelle» (Gnose) Guénon avait une telle certitude de la vérité, la sienne, que même Dieu ne pouvait rien lui apprendre qu’il ne connaissait déjà. Cette disposition intellectuelle, compte tenu de son immense talent d’écrivain, appuyé sur une logique (mathématique), le destinait à devenir un porte-parole de cette doctrine Tradition primordiale.
    Guénon ignorait-il qu’il y a deux Traditions primordiales, et non pas une seule; ou est-ce une conséquence logique de l’émanatisme? L’«émanatisme» engendre logiquement le monisme métaphysique impliquant une seule tradition, de laquelle dérivent les traditions secondaires, telles les ramifications d’un même tronc. Émanatisme implique aussi une continuité entre le «principe» et sa manifestation. Cette continuité se fait par degrés, que l’on retrouve, entre autres, dans les sephirot de l’arbre kabbalistique, également d’origine gnostique. C’est donc le «principe» qui se manifeste: c’est du panthéisme! Cette doctrine nie non seulement la Création ex nihilo, mais s’y oppose, et il s’ensuit logiquement qu’elle considère la Révélation d’un autre regard.
    Adam et Eve ont été créés en état de grâce; ils participaient ainsi directement à la vie surnaturelle sans toutefois atteindre le Ciel. C’est l’état de justice originelle ou l’état d’innocence. Il n’y a pas de Tradition primordiale paradisiaque parce qu’Adam avait la science infuse, donc il n’y avait strictement rien à transmettre, parce que «tradition» c’est transmettre. Selon la Révélation, il y a deux Traditions, apparues avec les deux postérités directement issues du Péché. En réponse à la Tentation du serpent «Vous serez comme Dieu.» (Eritis sicut Dii), Dieu dit: «Je mettrai des inimitiés entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité, et c’est la postérité de la femme qui écrasera la tête du serpent.». La lignée, issue de la Révolte ira jusqu’au bout de sa logique sans le moindre scrupule, tandis que l’autre lignée restera fidèle à la Promesse divine. Elles engendrent deux voies: l’une prétend pouvoir délivrer l’homme par la science (de l’Arbre), l’autre le Salut par la Foi. Ces deux traditions sont inconciliables, mais celle de la Science (de la Gnose des initiés) ne va pas se développer indépendamment de l’autre. Sa nature perfide consiste à détourner le sens de la Révélation en s’y mêlant sous un subterfuge, afin de la fausser, engendrant ainsi non seulement des déviations, mais aussi des contre-vérités…

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