Nouvelle sortie : Friedrich Nietzsche – Correspondance

Morceaux choisis, sélectionnés par Arthur Sapaudia !


Quelques extraits :

Être un philistin, un anthropos amousos, homme du troupeau — que m’en gardent Zeus et toutes les Muses ! Aussi bien je ne saurais guère de quelle façon m’y prendre pour le devenir, ne l’étant point.

À CARL VON GERSDORFF [Naumburg, 11 avril 1869]

J’ai fini par éprouver trop de dégoût pour la diablerie fulminatrice, détestable, arrogante, envieuse et bilieuse de Luther qui ne se sentait pas bien tant qu’il ne pouvait pas expectorer sa rage sur quelqu’un.

À HEINRICH KÖSELITZ [Naumburg, 5 octobre 1879]

J’aimerais pouvoir retirer à l’existence humaine une part de son caractère désolant et cruel.

À HEINRICH VON STEIN [Gênes] début décembre 1882

(…) il semble que par un crime quelconque j’ai fait se tourner contre ma poitrine les pointes des plumes féminines — et ce n’est que justice !
Car, comme le dit mon amie Malwida, « je suis pire encore que Schopenhauer. »

À MALWIDA VON MEYSENBUG, Nice, [fin février 1887]

Ce matin j’ai joui d’un grand confort : pour la première fois, il y a une « idole de feu » dans ma chambre, un petit poêle — j’avoue que j’aurais presque exécuté une danse païenne autour.

À HEINRICH KÖSELITZ, Nice, 24 novembre 1887

Il y a eu, entre-temps, des heures sombres, des jours et des nuits entiers où je ne savais plus comment vivre, et durant lesquels j’étais en proie à un doute obscur tel que je n’en avais jamais connu auparavant. Malgré tout, je sais que je ne peux trouver d’échappatoire ni à gauche, ni à droite, ni en rebroussant chemin : je n’ai aucun choix. Cette logique-là seule me maintient en forme : à tous autres égards, mon état est insupportable et douloureux jusqu’à devenir torturant.

Mon dernier texte en révèle quelque chose : dans un état comparable à celui d’un arc tendu à se rompre, toute passion fait du bien si elle est violente. Il ne faut désormais plus attendre de moi des « jolies choses » : pas plus qu’on ne peut attendre d’un animal souffrant et affamé qu’il déchiquette sa proie avec grâce. Le manque, durant des années, d’une affection humaine réellement reposante et salvatrice, l’isolement absurde que ce défaut implique, le fait que presque tout ce qui subsiste de relations humaines ne soit qu’une cause de blessures, tout cela participe du pire et n’a qu’une unique légitimité, celle d’être nécessaire.

À FRANZ OVERBECK Nice, le 3 février 1888

Je suis, en effet, assez fort pour briser en deux l’histoire de l’humanités.

À GEORG BRANDE, Torino, 20 novembre 1888

À la princesse Ariane, ma bien-aimée

C’est un préjugé que je sois un homme. Mais j’ai déjà souvent vécu parmi les hommes et je connais tout ce que les hommes peuvent éprouver, du plus bas au plus haut. J’ai été Bouddha chez les Hindous, Dionysos en Grèce — Alexandre et César sont mes incarnations, de même que le poète de Shakespeare, Lord Bacon. Enfin je fus encore Voltaire et Napoléon, peut-être Richard Wagner… Mais cette fois, j’arrive tel le Dionysos vainqueur qui va transformer la terre en jour de fête… Non pas que j’aurais beaucoup de temps… Les cieux se réjouissent que je sois la… J’ai aussi été pendu à la croix…

À Cosima Wagner, Turin, 3 janvier 1889



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